Photo ci-dessus, une branche basse de chêne de Turner, arbre de choix pour les jeux des enfants.
Orcq présente une caractéristique largement méconnue de tous qui est de posséder une bonne vingtaine d’arbres remarquables répertoriés à la Division Nature et Forêts (DNF) de la région wallonne.
A l’exception du Liquidambar dans la propriété de Madame Drouillon, tous les autres se trouvent dans le parc de la Marlière. On mentionnera cependant les deux tilleuls entourant la chapelle ND de la Paix et les deux pruniers de Pissard de la place communale abattus entre 2010 et 2013 car, ils devenaient dangereux.
Grâce à l’accord enthousiaste de Mr et Mme Letartre les propriétaires, et à la coopération des ingénieurs forestiers Guy Coster et Martin Cléda de la DNF, que nous remercions, nous avons pu refaire un relevé de ces arbres, le dernier datant de 1992. Les agents de la DNF ont pu mesurer leur croissance, juger leur état sanitaire et relever leurs coordonnées GPS. Sauf mention contraire la circonférence des arbres est prise à environ 1.5 m du sol.
L’âge moyen de ces arbres est d’environ 140 à 180 ans ce qui situe leur plantation dans la deuxième moitié du XIXème siècle. L’année 1845 est approximativement celle de l’achat de la Marlière par Victor Crombez et 1898 son année de décès. On peut donc conclure que c’est lui qui a choisi et fait planter ces arbres. Ce n’est pas une surprise car il était passionné par la création de jardins et le monde des plantes, on sait qu’il avait construit à Orcq un magnifique jardin d’hiver inauguré en janvier 1853, et qu’il avait dessiné les plans des jardins de la propriété de sa sœur Henriette à Oignies en France.
1 Les chênes de Turner
Les arbres les plus rares sont sans doute les trois chênes de Turner Quercus x turneri. Le chêne de Turner est un hybride entre le chêne vert ou chêne faux houx (Quercus ilex) et le chêne pédonculé (Quercus robur) obtenu par le pépiniériste anglais Turner en 1783 dans l’Essex. Ses feuilles sont de texture coriace et persistantes, mais il peut les perdre lors des gelées hivernales. Sa ramure particulière avec beaucoup de branches horizontales et son tronc peu élevé en fait un arbre apprécié de ceux qui aiment grimper dans les arbres. On peut supposer qu’au milieu de XIXème siècle cet arbre n’était connu que de rares amateurs dont Victor Crombez faisait partie. Il en existe un exemplaire, probablement un des plus anciens connus, planté en 1798 dans le célèbre jardin botanique de Kew en Angleterre ce qui en fait un spécimen vénérable de 211 ans
2 L’érable plane de la variété schwedleri
Cet érable se trouve dans la partie du parc entre la chaussée de Lille et le château. Lorsque Victor Crombez a acheté la Marlière vers 1845 cette zone ne faisait pas partie du domaine et il était impossible d’accéder au château à partir de la chaussée de Lille. L’accès se faisait par une drève, aujourd’hui disparue qui partait du chemin Vert. Victor Crombez a acquis ces terrains qui étaient cultivés entre 1860 et 1870. L’âge approximatif de l’érable vient confirmer nos dires puisqu’il aurait environ 140 ans.
Il s’agit d’un érable plane Acer platanoïdes de la variété schwedleri. A maturité les érables planes ont une circonférence d’environ 3 m, celui-ci présente la particularité d’être nettement plus imposant avec une circonférence de 4 m 44. Malheureusement il a fallu constater qu’un champignon parasite, le Ganoderma commençait à faire son œuvre et le diagnostic est qu’il ne lui reste plus qu’une dizaine d’années à vivre.
Le Ganoderma se reconnaît à sa partie extérieure appelée carpophore en forme de console. Ces consoles se trouvent au niveau du pied de l’arbre et parasitent les racines qu’ils fragilisent et peuvent ainsi provoquer sa chute.
3 Platanes d’orient
Deux platanes d’orient Platanus orientalis se trouvant dans la propriété ont été classés comme arbres remarquables. La photo qui représente celui qui se trouve du côté extérieur des douves à l’arrière du château montre le tronc lors de la mesure de sa circonférence qui est de 4 m 10.
L’autre exemplaire classé se trouve près du terrain de tennis.
4 Groupe de cinq hêtres pourpres
Cinq hêtres pourpres Fagus sylvatica purpurea ont été plantés en groupe au bout de la grande pelouse qui s’étend en face de la façade sud du château. Plus de 150 ans après leur plantation ces arbres réunis forment, aujourd’hui, un massif majestueux de toute beauté. Une ancienne photo transmise par Xavier Crombez de Montmort, un descendant de Victor, montre ce massif en septembre 1907 lors d’une fête populaire organisée dans le parc de la Marlière à l’occasion du mariage du petit-fils de Victor Crombez. L’un des 5 hêtres présente malheureusement des signes d’attaque par le champignon parasite Phomes.
5 Les autres hêtres pourpres
Trois autres hêtres pourpres Fagus sylvatica purpurea sont aussi classés.
Cette mesure, exagérée par la présence du bourrelet, ne peut cependant être une indication de l’âge de l’arbre. Plusieurs autres hêtres dignes d’intérêt se trouvent dans la propriété mais certains ont cependant été fragilisés par les travaux récents entrepris dans le parc.
Un des trois hêtres classés se trouve près du château, on le voit ici, à droite sur la photo près de l’habitation. Rappelons que cette maison localement appelée « Château Horlait » a été construite vers 1920 par Gaston Horlait pour remplacer le château Crombez détruit lors de la guerre 14 18. La demeure a été agrandie et rénovée avec beaucoup de goût en 2008 par la famille Letartre.
6 Le châtaignier
Ce châtaignier commun Castanea sativa se trouve le long de la rue de l’église Sainte Agathe près du N° 12 (pavillon de chasse) et son tronc est dérobé à la vue du passant par un mur, ce qui est regrettable car il présente une masse respectable de 4 m 98 de circonférence.
Ayant vécu en solitaire il a eu de la place en suffisance pour développer une couronne imposante curieusement beaucoup plus étoffée à la base de l’arbre.
Nous venons de décrire et illustrer les sujets les plus remarquables présents dans le parc de la Marlière mais pour être exhaustifs nous nous devons de citer les autres arbres classés qui s’y trouvent :
Un Ginkgo biloba qui se trouve près du châtaignier
Un hêtre commun à feuilles laciniées Fagus sylvatica laciniata
Un magnolia hybride Magnolia x soulangeana
Un copalme d’Amérique Liquidambar styraciflua
Un ptérocaryer du Caucase Ptérocarya fraxinifolia
Un marronnier d’Inde Aesculus hippocastanum
Un sapin du Caucase Abies nordmanniana
Enfin quelques arbres remarquables ont disparu soit qu’ils menaçaient de tomber ou que leur développement ravissait trop de lumière aux occupants du château. A ce sujet nous avons reproduit ci-dessous une curieuse photo datant probablement des années 30 et qui montre les porte-drapeaux des sections de supporter de l’Union de Tournai dont Gaston Horlait était président. Mais ce sont les deux cyprès chauves dont on devine la cime à gauche de la photo et le hêtre pleureur droite qui doivent retenir notre attention car ils ont disparu.
Ces vénérables centenaires orcquois nous ont permis d’aborder deux de nos préoccupations : le patrimoine historique en rappelant une facette supplémentaire du rôle de Victor Crombez à Orcq et le patrimoine naturel, qui nous en sommes persuadés, se trouve actuellement en bonnes mains.
A propos des arbres remarquables en Belgique
Les premiers inventaires dignes de ce nom sont réalisés à partir de 1910, lorsque Jean Chalon répertorie 1279 arbres dans trois fascicules intitulés « Arbres remarquables de la Belgique ».
En 1978, le service des Eaux et Forêts met en évidence 200 arbres remarquables et en 1992, la Société Belge de Dendrologie publie « Arbres de Belgique » où 4500 « champions » sont répertoriés dans l’ensemble de la Belgique.
Depuis, des inventaires ont été réalisés dans toutes les communes wallonnes, sélectionnant environ 25.000 arbres isolés, en groupe ou alignements ainsi que des haies.
Aujourd’hui, au sein du Département de la Nature et Forêts du Service Public de Wallonie, la cellule « arbres et haies remarquables » continue de gérer l’ensemble des données, donne des avis en matière d’urbanisme et d’ordre sanitaire et met à jour les données (compléments, cartographie, mesures).
Addendum mai 2015
Au point 2 plus haut nous présentions l’Acer platanoïdes de la variété schwedleri. Le diagnostic de Martin Cléda, ingénieur forestier responsable des arbres remarquables de Wallonie, était en 2009 que l’arbre n’avait plus qu’une dizaine d’années à vivre. Sa prédiction était malheureusement fondée et dans la nuit du 19 au 20 mai 2015 il s’est effondré. On a pu constater que presque toute la base était colonisée par le mycélium parasite. La circonférence à la base de 4,44 mètres mesurée en 2009 en faisait un sujet exceptionnel pour un érable plane.